[INTERVIEW] Tjasha Gafner : « Un programme axé sur Ravel, pour les 150 ans de sa naissance »

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Gagnante du prestigieux Concours ARD de Munich en 2023, la harpiste suisse Tjasha Gafner célèbre le père du Boléro, le mardi 14 janvier, à 19 heures, en compagnie de musiciens de l’OPRL.
  

Vous êtes née en Suisse, quelles sont vos origines et vos attaches culturelles ?

Je suis originaire de Lausanne, en Suisse romande. Bien que mes engagements me fassent souvent voyager, Lausanne reste mon point d’ancrage. Mon prénom, d’origine slovène, rend hommage à mes racines familiales, en particulier à ma grand-mère, originaire de Ljubljana.

Comment avez-vous découvert la harpe et qu’est-ce qui vous a séduite dans cet instrument ?

Je viens d’une famille d’artistes : ma mère est pianiste et c’est grâce à ma marraine harpiste que j’ai découvert cet instrument. Un jour, elle m’a emmenée à une répétition du Lac des cygnes de Tchaïkovski à Lucerne, et j’ai été fascinée par la harpe dans la fosse d’orchestre. J’aimais aussi l’idée de pouvoir jouer assise, contrairement au violon que j’étudiais debout (rire).

Vous avez étudié à la fois à Lausanne et à la Juilliard School de New York. Quelles différences percevez-vous entre ces deux enseignements ?

J’ai eu la chance de suivre un parcours musical très riche. À Lausanne, j’ai étudié pendant neuf ans avec Letizia Belmondo, qui m’a profondément marquée. Ce qui était intéressant, c’est que Letizia avait elle-même été formée à la Juilliard School par Nancy Allen, avec qui j’ai ensuite poursuivi mes études. Leurs approches étaient similaires dans la rigueur et la passion pour l’instrument, mais New York m’a ouvert à une effervescence artistique et interdisciplinaire, en particulier à travers des collaborations avec des danseurs et des acteurs. Cela a enrichi ma vision de la musique.

Vous avez remporté plusieurs concours prestigieux, dont l’ARD de Munich. Quel rôle ces compétitions ont-elles joué dans votre développement ?

Les concours ont structuré mon éducation musicale et m’ont donné une discipline essentielle pour atteindre l’excellence. Participer à des concours comme l’ARD de Munich, en 2023, ou celui des Médias francophones publics, en 2022, a été une expérience formatrice. Ils m’ont appris à développer chaque œuvre dans ses moindres détails, car le niveau d’exigence est très élevé. Remporter ces concours m’a aussi permis de m’épanouir et de rencontrer des musiciens exceptionnels avec qui je collabore encore aujourd’hui.

New York m’a ouvert à une effervescence artistique et interdisciplinaire, en particulier à travers des collaborations avec des danseurs et des acteurs. Cela a enrichi ma vision de la musique.

Vous êtes très engagée dans le développement du répertoire pour harpe. Comment contribuez-vous à cet objectif ?

Le répertoire pour harpe est relativement limité, c’est pourquoi je me suis lancée dans l’adaptation de pièces écrites pour d’autres instruments, notamment des œuvres pour piano ou pour orchestre. J’ai par exemple transcrit des sonates de Haydn, de Mozart et même une suite de Bach. Je prends beaucoup de plaisir à relever ce défi, et j’espère continuer à enrichir ce répertoire pour les générations futures. Par ailleurs, j’ai la chance de pouvoir donner régulièrement en première audition des œuvres nouvelles de compositeurs actuels comme Heinz Holliger, Constantin Macherel, Ziyi Tao, Jake Safirstein ou Laurent Coulomb.

 

Vous avez enregistré plusieurs disques. Pouvez-vous nous parler de ces projets ?

Mon premier album solo, enregistré à 18 ans, reste un souvenir marquant, à un moment où je terminais mes études secondaires. J’ai ensuite collaboré avec la flûtiste Helena Macherel sur plusieurs projets, dont un enregistrement du Concerto pour flûte et harpe de Mozart. Nos albums sont le reflet d’une complicité artistique et amicale. Nous avons aussi relevé des défis intéressants, comme la transcription de la Danse des sept voiles de Richard Strauss, initialement écrite pour orchestre. Mon prochain album, prévu pour 2025, sera un recueil de transcriptions de pièces classiques pour harpe.

Vous jouerez bientôt à Liège avec des musiciens de l’OPRL. Pouvez-vous nous en dire plus sur ce programme et sur votre collaboration avec Jean-Luc Votano ?

Je me réjouis énormément de ce concert, qui mettra en lumière la harpe dans le répertoire français. Le programme est axé sur Maurice Ravel, pour les 150 ans de sa naissance, un compositeur qui a su magnifier cet instrument, mais il inclura également des œuvres de Fauré et d’autres compositeurs. La rencontre avec Jean-Luc Votano, clarinettiste de l’OPRL, a été décisive. Nous avons joué ensemble lors du gala des Médias francophones publics, et dès ce moment, nous avons su que nous devions rejouer ensemble. Ce concert est donc l’aboutissement de cette belle collaboration, et je suis impatiente de partager ce moment avec le public liégeois.

Propos recueillis par Éric Mairlot



En concert le mardi 14/01 à 19h, dans le cadre du Happy Ravel ! de la série Happy Hour! 

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