Rencontre avec László Fassang

Rencontre avec László Fassang

Interprète du nouveau concerto pour orgue de Philipp Maintz, l'organiste hongrois évoque son contact avec le compositeur. Création le 17 septembre à Bruxelles, le 18 à Liège.

 

Vous créez le Concerto pour orgue du compositeur allemand Philipp Maintz. Est-ce la première fois que vous collaborez avec lui ?

Oui. L’œuvre est en fait une commande de BOZAR MUSIC confiée aux bons soins de l’OPRL, dont le Directeur musical, mon compatriote Gergely Madaras, a souhaité me confier la partie soliste. Il faut dire que nous nous connaissons bien, Gergely et moi. Nous avons eu l’occasion de collaborer en 2016, pour un concert « orgue et orchestre » avec des œuvres de Liszt, Poulenc, Barber et Richard Strauss, et en 2018, pour la création du Concerto pour orgue de Zsigmond Szathmáry, lors du concert d’inauguration de l’orgue de l’Académie de musique Franz Liszt de Budapest.

Comment s’est établi le contact avec Philipp Maintz ?

Nous nous sommes vus une première fois le 8 mars, lors d’un récital que je donnais à l’Elbphilharmonie de Hambourg. Ensuite, pendant le confinement, nous sommes restés en contact par Internet. J’ai reçu la partition à la fin du mois de juin. Nous avons eu ensuite une session de « corrections » ou de propositions d’adaptations qui se sont passées dans un très bon esprit de collaboration. Philipp Maintz connaît assez bien l’orgue pour avoir côtoyé Jean Guillou et le grand orgue de Saint-Eustache à Paris, où ont été jouées certaines de ses œuvres.

Vous êtes un improvisateur de haut vol. Une place est-elle laissée à l’improvisation dans ce concerto ?

Non, il n’y a pas de cadence improvisée. Philipp Maintz a une vision précise de ce qu’il veut. Tout est inscrit avec soin dans la partition mais son style d’écriture donne l’illusion d’une certaine liberté. Sur le plan de l’interprétation, il ne demande pas de rubato mais le matériau musical est déjà par essence assez libre et souple. C’est une partition difficile qui requiert une étude rigoureuse. Et surtout, il faut un excellent chef d’orchestre. Mais pour cela, je n’ai aucune crainte avec Gergely !

Avez-vous déjà créé d’autres concertos ?

Outre le Concerto de Szathmáry, cité plus haut, j’ai eu l’occasion, en 2017, de partir en tournée avec l’Orchestre du Concertgebouw d’Amsterdam dirigé par mon compatriote Peter Eötvös, à l’occasion de la création de son concerto Multiversum, pour orgue, orgue Hammond et orchestre. Iveta Apkalna tenait la partie d’orgue et je jouais l’orgue Hammond. Nous avons notamment joué au Palais des Beaux-Arts de Bruxelles, en octobre 2017.

L’orgue Hammond vous permet d’ailleurs de pratiquer le jazz…

Oui, j’en joue depuis une vingtaine d’années. Depuis quatre ans, je fais même partie d’un quartette, ce qui est très précieux pour un organiste, car cela permet de jouer très régulièrement avec d’autres musiciens, et de se familiariser avec les grilles harmoniques. Sur le plan de l’improvisation, cela m’aide aussi à renouveler mon langage, à avoir des idées nouvelles.

Le coronavirus a-t-il bouleversé votre quotidien ?

Oui, bien sûr, comme celui de tous les artistes. J’ai été confiné chez moi à Budapest et je suis resté sans donner de concert pendant cinq mois. Mais sur le plan personnel, je n’ai pas vécu ça comme une catastrophe. Je l’ai pris comme une « très grande pause » dans ma carrière, une pause qui m’a permis de faire beaucoup de choses que mon emploi du temps m’interdisait jusque-là. J’ai dû donner cours en ligne à mes élèves du Conservatoire de Paris. Je leur envoyais les thèmes et ils m’envoyaient des enregistrements de leurs improvisations. J’ai aussi trouvé beaucoup d’avantages à cette manière de donner cours. Cela m’a permis de davantage discuter, réfléchir, poser des questions aux élèves et leur donner plus de liberté, dans une atmosphère libérée du stress de l’examen. Puis, vous savez, le silence est très important en musique. J’ai pu l’apprécier en ces moments particuliers. Depuis la mi-août, les concerts reprennent. Récemment, j’ai donné deux concerts en Hongrie ; je jouerai bientôt au Festival de Varsovie puis en récital à l’Académie Franz Liszt de Budapest.

Propos recueillis par Éric Mairlot

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