Trois questions à Ralph Szigeti
En soliste avec l’Orchestre et Gergely Madaras le 31 octobre, le chef du pupitre d'altos de l'OPRL créera la nouvelle œuvre d’Éric Gerstmans, Ralphsodie.
Comment avez-vous été embarqué dans cette création d’Éric Gerstmans ?
En 2015, lors d’une tournée en Espagne, Éric m’a entendu fredonner une chanson de Charles Aznavour. Il a découvert mon attrait pour la chanson française. De fil en aiguille, nous nous sommes rapprochés et il m’a présenté ses différents projets dont son « Mozart Vibration », la rencontre détonante de Mozart et du reggae, et ses réalisations dans le monde du swing. Il m’a alors promis de composer un concerto pour moi dans lequel il me ferait chanter. Au début c’était une sorte de blague, et même un running gag. Jusqu’à ce qu’Éric se mette à esquisser ce concerto. En parallèle, il en a parlé à la direction de l’OPRL et la Ralphsodie a pris pleinement forme.
Quelles sont les caractéristiques de cette Ralphsodie?
C'est une pièce dont la forme est classique, découpée en quatre mouvements, avec des harmonies toutefois influencées par le jazz et la variété car l’œuvre est dédiée au violoniste Jean-Pierre Catoul. Partout on retrouve la patte d’Éric, caractérisée par un véritable cocktail de styles. Ainsi, à la fin du deuxième mouvement, conçu dans le style de Michel Legrand, apparaît une séquence surprenante dans un langage et avec des ornementations de l’époque baroque. À ma demande, Éric a ajouté un mouvement folk car je souhaitais la présence de musique traditionnelle. Ainsi, le troisième mouvement est conçu sur une gigue d’inspiration irlandaise.
Il y a quelques références à la chanson française mais elles sont moins nombreuses que ce qu’Éric aurait espéré ; je ne suis pas chanteur et je dois surtout rester concentré sur la partie d’alto solo. On pourra néanmoins m’entendre dans le 4e mouvement chantonner « Le monde entier est un cactus » de Jacques Dutronc. Et dans le premier mouvement, j’aurai même un passage parlé inspiré par Serge Gainsbourg.
Comment est écrite la partie pour alto ?
Elle comporte des parties véritablement jouissives. Je ne joue pas tout le temps, mais par moment, l’alto se rajoute comme une couche au reste de l’instrumentation et se fond dans la rythmique générale. Quand j’ai commencé à déchiffrer l’œuvre, les oreilles d’Éric ont dû siffler car les passages très swing, les rythmes chaloupés signifiaient de nouveaux réflexes à acquérir. J’étais en dehors de ma zone de confort. Je suis d’ailleurs intervenu personnellement dans le processus de création pour remanier certains passages rythmiques qui devaient être simplifiés à mon sens. Une fois dans le bain, cela devient très vite organique et agréable. L’œuvre contient aussi une partie importante de harpe électrique. On pourrait dire de la Ralphsodie qu’il s’agit d’un double concerto...
Propos recueillis par Stéphane Dado